Autisme : une empreinte biologique détectable dès les premiers instants de vie ?

Publié le 14 avril 2025

Une étude japonaise révèle que l’analyse du sang de nouveau-nés pourrait révéler des marqueurs liés aux troubles du spectre autistique. Si cette piste prometteuse ouvre des perspectives inédites, les scientifiques rappellent qu’elle nécessite encore des validations approfondies.

Un lipide prometteur dans l’étude des troubles autistiques

Depuis longtemps, la communauté scientifique tente de percer les mystères des troubles du spectre autistique (TSA). Est-ce une question d’hérédité ? De facteurs externes ? Ou d’une combinaison complexe des deux ? Une récente recherche menée à l’université de Fukui au Japon met en lumière un élément intrigant : le diHETrE, un acide gras détecté dans le sang du cordon ombilical.

Ce composé lipidique, dérivé de l’acide arachidonique, a montré une corrélation avec certains symptômes du TSA observés six ans après la naissance. L’étude portant sur 200 enfants a démontré que des concentrations élevées de diHETrE correspondaient à des défis dans les relations sociales, alors que des taux plus bas étaient reliés à des conduites stéréotypées. Cette association semblait particulièrement significative chez les petites filles.

L’importance capitale de cette avancée

Pouvoir identifier dès les premiers instants de vie un éventuel risque de développer un TSA représenterait une avancée majeure. Cela ouvrirait la voie à des prises en charge précoces, dont l’efficacité sur le développement cognitif et émotionnel des enfants est bien documentée.

Le professeur Hideo Matsuzaki, principal investigateur de l’étude, souligne : « Nos observations indiquent que le métabolisme du diHETrE in utero influencerait significativement le développement ultérieur. » Il évoque la possibilité que ce biomarqueur devienne un jour un outil de dépistage fiable.

Vers une prévention des caractéristiques autistiques ?

Plus fascinant encore : les chercheurs émettent l’hypothèse qu’une modulation du métabolisme de cet acide gras durant la grossesse pourrait atténuer certaines manifestations autistiques. Il ne s’agit pas de parler de « traitement » – notion controversée – mais plutôt de mieux appréhender les mécanismes sous-jacents.

Les acides gras polyinsaturés (AGPI) comme le diHETrE jouent un rôle pivot dans les processus inflammatoires cérébraux durant le développement fœtal. Synthétisés à partir de l’alimentation (notamment des oméga-6), ces composés peuvent avoir des impacts aussi bien positifs que négatifs selon leur équilibre dans l’organisme.

Des conclusions à interpréter avec mesure

Malgré ces perspectives encourageantes, les scientifiques – y compris le professeur James McPartland de Yale – insistent sur la nécessité de rester prudent. Ils qualifient cette étude d’« exploratoire » : elle trace une direction, mais ne permet pas encore d’applications cliniques directes.

Pourquoi cette réserve ? D’abord parce que la méthodologie diagnostique employée pour identifier les TSA présente des limites. Elle nécessite d’être complétée par d’autres approches pour gagner en fiabilité. Ensuite, les résultats obtenus sur 200 sujets doivent être reproduits à plus large échelle pour être validés.

Portée réelle de cette découverte

En substance, cette recherche représente non pas une révolution, mais un pas significatif. Elle ne permet pas de poser un diagnostic précoce de l’autisme, mais elle identifie un marqueur biologique qui, combiné à d’autres avancées, pourrait améliorer l’accompagnement des enfants concernés.

Surtout, elle souligne à nouveau l’importance cruciale de l’environnement intra-utérin dans le développement neurologique. À l’image d’une plante qui s’épanouit selon la qualité de son sol, notre cerveau se construit dès les premiers stades de la vie.

L’autisme : un puzzle qui s’assemble progressivement

Ce que révèle cette étude, c’est que la connaissance progresse : pas à pas, avec rigueur, mais avec des perspectives tangibles. Si demain un simple prélèvement à la naissance permettait d’identifier les enfants nécessitant un suivi adapté, ce serait une avancée discrète mais déterminante.

Ainsi, même si de nombreuses zones d’ombre persistent, chaque nouvelle découverte dans le domaine des TSA nous rapproche d’une compréhension plus nuancée, plus respectueuse de la neurodiversité.