Quand l’excès de compliments dans l’enfance se retourne contre l’adulte

Publié le 21 avril 2025

Vouloir stimuler son enfant par des éloges constants semble bienveillant, mais cette pratique pourrait avoir des conséquences insoupçonnées. Et si cette survalorisation infantile engendrait plus de fragilités que de confiance en grandissant ? Un paradoxe éducatif qui interroge.

Les compliments excessifs : un piège pour l’épanouissement de l’enfant

Dans notre société moderne, il est courant de voir des parents submerger leurs enfants de félicitations dès leurs premiers exploits, qu’il s’agisse de marcher, de dessiner ou d’obtenir de bonnes notes. Si ces encouragements sont essentiels pour bâtir une solide estime de soi, leur excès peut paradoxalement se révéler néfaste.

La psychiatre Yasmine Liénard met en garde contre cette tendance à la survalorisation : en couvrant constamment l’enfant d’éloges, les parents créent sans le vouloir une attente permanente de performance. L’enfant finit par croire que l’amour et la reconnaissance dépendent de ses réussites, comme un athlète qui ne se sentirait digne que sur la plus haute marche du podium.

Quand la quête de perfection devient un fardeau

Cette éducation, bien que motivée par les meilleures intentions, peut transformer le développement émotionnel de l’enfant en un véritable parcours du combattant. Comme un acrobate marchant sur une corde raide, il ressent la nécessité de toujours se surpasser, sans droit à l’erreur ni à la médiocrité.

Progressivement, l’enfant devient dépendant des validations extérieures. Son bien-être émotionnel fluctue au gré des compliments reçus de ses proches, de ses professeurs, puis plus tard dans sa vie professionnelle. Il intègre l’idée que seuls les succès spectaculaires et l’image parfaite méritent d’être reconnus, tandis que les moments ordinaires perdent toute valeur à ses yeux.

L’âge adulte : une confiance en apparence seulement

À l’âge adulte, ce besoin constant de reconnaissance peut évoluer vers des traits narcissiques, très éloignés d’une authentique assurance. Ces individus donnent souvent l’impression d’une grande confiance en eux, mais cette façade s’écroule au moindre échec ou critique.

Ils ont du mal à accepter les feedbacks négatifs, refusent d’admettre leurs imperfections et fuient toute situation où ils pourraient ne pas exceller. Leur valeur personnelle semble entièrement liée à la perception des autres. Pourtant, comme le rappelle la psychiatre, la vraie vie est faite de hauts et de bas, d’essais et d’erreurs – autant d’expériences que ces personnes ont du mal à intégrer, générant ainsi frustration et souffrance.

Comment cultiver une estime de soi saine ?

Heureusement, des solutions existent. Le Dr Liénard recommande d’aider l’enfant à s’accepter dans sa globalité, avec ses forces et ses faiblesses. Des formulations comme : « Je suis fier de toi pour avoir persévéré » ou « Tu as de la valeur, même quand les choses ne se passent pas comme prévu » peuvent faire toute la différence.

L’idée est de mettre l’accent sur le processus plutôt que sur l’aboutissement, d’apprendre à l’enfant que ses émotions et ses échecs font partie intégrante de son identité. Comme les pièces d’un kaléidoscope, chaque aspect de sa personnalité contribue à créer une image unique et précieuse.

Trouver le juste milieu dans l’éducation

Notre culture française met souvent l’accent sur la réussite : résultats scolaires, performances, accomplissements… Mais comme dans une recette équilibrée, trop d’un seul ingrédient peut déséquilibrer l’ensemble. Les encouragements sont bénéfiques, mais doivent être dosés avec discernement. Car aimer son enfant inconditionnellement, c’est l’accepter dans toutes ses dimensions, pas seulement dans ses moments de gloire.

La perfection n’est pas nécessaire pour s’épanouir

Au final, ce dont un enfant a vraiment besoin, ce n’est pas d’une admiration sans faille, mais d’être reconnu dans toute son authenticité. Lui offrir une estime de soi robuste, c’est lui donner les outils pour naviguer dans la vie avec résilience et sincérité. Et cela représente sans conteste le plus précieux héritage qu’un parent puisse transmettre.