La posture assise féminine : un langage silencieux chargé de sens
Ce geste apparemment anodin que nous répétons machinalement chaque jour raconte en réalité une histoire complexe mêlant codes sociaux, héritage culturel et psychologie. Notre façon de nous installer sur une chaise révèle bien plus que nous ne l'imaginons sur notre rapport au monde et aux attentes genrées. Décryptage d'une habitude corporelle qui parle à notre place.
Un legs culturel profondément ancré dans notre posture
Ce mouvement est devenu si naturel qu’on en a oublié son origine. Adopter cette position assise particulière résulte pourtant d’un apprentissage social profond. Durant le siècle des Lumières en Europe, elle symbolisait l’élégance et le savoir-vivre, une façon d’afficher son éducation raffinée… et surtout sa retenue. Les guides de bonnes manières de l’époque étaient formels : une digne représentante de la gent féminine se devait d’adopter une attitude réservée et maîtrisée.
Le contexte culturel influence cependant considérablement sa perception. En Asie, particulièrement au Japon et en Corée, cette posture peut être perçue comme inconvenante, surtout en présence de personnes plus âgées ou dans des cadres officiels. La position valorisée y est généralement plus droite, les deux plantes de pieds reposant fermement sur le sol. Preuve qu’un mouvement apparemment banal peut revêtir des significations radicalement opposées selon les latitudes !
Aujourd’hui encore, ces conventions historiques continuent d’imprégner nos comportements contemporains. Entre modèles véhiculés par les médias, règles non écrites et pressions plus ou moins visibles, cette manière de s’asseoir demeure un réflexe conditionné… souvent au prix du bien-être physique.
Le langage corporel : ce que notre assise révèle de nous
Au-delà des dimensions culturelles, cette posture peut également trahir notre état psychologique. Elle constitue un véritable idiome non verbal : celui du corps. Nous l’ignorons fréquemment, mais notre attitude physique s’exprime bien avant nos paroles.
Une cuisse reposant sur l’autre, orientée vers notre interlocuteur ? Cela peut dénoter de l’attention, peut-être même une certaine affinité. Des membres inférieurs entrelacés et ramenés vers soi ? Une manifestation de réserve, un besoin d’établir une frontière sécurisante. À l’opposé, une position dégagée, les deux pieds solidement posés au sol, peut communiquer une impression de sérénité et d’assurance.
Et figurez-vous que ces attitudes ne sont pas neutres du point de vue du genre. Dès le plus jeune âge, les fillettes reçoivent des encouragements – souvent inconscients – à « se tenir correctement », à « adopter une posture convenable », tandis que les petits garçons bénéficient d’une liberté posturale plus grande, pouvant même s’étaler sans gêne. Une distinction en apparence insignifiante, mais qui révèle beaucoup sur les rôles sexués que la société nous assigne dès l’enfance.
L’impact de notre position assise dans la sphère professionnelle
Dans l’environnement professionnel, pendant des réunions, ou durant un recrutement, notre façon de nous asseoir peut affecter l’image que nous projetons. Les recherches en psychologie sociale l’ont abondamment confirmé. Une attitude corporelle tendue peut être assimilée à un déficit de confiance. Au contraire, une position aisée, stable et équilibrée transmet un message sans équivoque : « Je suis légitime ici. »
Pour les femmes, cela peut représenter un exercice d’équilibre subtil. Comment concilier aisance physique et projection d’une image compétente et professionnelle, sans céder aux clichés de la « femme trop directive » ou « insuffisamment féminine » ? Eh oui, même dans notre manière de nous asseoir, nous devons fréquemment naviguer entre expression personnelle et conformité aux attentes.
Et si nous cessions d’évaluer… les postures assises ?
Finalement, ce mouvement infime, si routinier et discret, soulève une question autrement plus fondamentale : celle de l’autonomie corporelle. Pourquoi certaines attitudes restent-elles considérées comme plus « convenables » pour les femmes ? Pourquoi l’esthétique serait-elle privilégiée au détriment du bien-être ? Et si nous commencions à questionner ces standards implicites ?
Après tout, s’asseoir, c’est aussi affirmer sa présence dans l’espace. Et il est grand temps que chaque femme puisse le faire en toute liberté, sans justification, sans restriction, ni jugement inquisiteur.


